Rapport de morsure par une mygale du genre Poecilotheria

Merci à Roman pour me permettre de publier sa mésaventure !

Pour mise en garde, les mygales ne sont pas des animaux inoffensifs et j’entends le démontrer par ma propre expérience. Avis aux amateurs, si cela peut éviter certains comportements alors mon message aura servi à quelque chose.

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Poecilotheria rufilata ©Roman Rondet

Rapport de morsure de Poecilotheria rufilata, femelle adulte.
Par Roman RONDET :

Contexte de la morsure :

Samedi 27 août 2016 vers 16h

Parti pour faire un peu de ménage dans le terrarium de ma femelle P. rufilata, je décide de la faire sortir, j’attrape donc le tronc de liège dans lequel elle se cache avec délicatesse de la main droite, malencontreusement mon coude tape dans le mur derrière moi au moment où je recule le tronc ce qui donne un violent à-coup.
L’araignée, prise de panique, se met directement à courir, elle avance sur ma main droite, remonte tout mon bras, court le long de mon dos jusque mon bras gauche puis s’arrête, c’est à cet instant qu’elle plante l’une de ses chélicères au niveau de mon biceps gauche (à peu près au milieu).
Je ressens tout de suite la pression d’entrée et bouge un grand coup mon bras par réflexe. L’araignée saute au sol, je lui mets tout de suite une boite dessus pour l’empêcher de s’enfuir puis la remets tranquillement dans le terrarium, l’animal va bien.

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Détail d’un chélicère de mygalomorphe ©sildar-god

Premiers symptômes :

Je sens tout de suite une sensation bizarre, chaleur et picotements, à l’endroit de la morsure je sais donc que quelque chose a été injecté et que la morsure n’est donc pas « sèche » même si le croc n’a pas été profondément enfoncé.

Je garde mon calme et mon sang-froid c’est très important dans ce genre de situation, l’accélération du rythme cardiaque inhérente à la panique entraine une propagation plus rapide du venin dans l’organisme, ce qui n’est pas souhaitable. Je nettoie l’endroit de la morsure avec un désinfectant.
Les venins pouvant être altérés ou détruits sous l’effet de la chaleur (thermolabiles) et les araignées ayant une force de propulsion du venin assez faible je tente une technique qui consiste à brûler l’endroit de la morsure permettant ainsi de détruire un maximum de venin (même si je sais pertinemment qu’une partie s’est déjà infiltrée dans mes vaisseaux capillaires), je me brûle donc légèrement avec un briquet, puis nettoie la brûlure (peu probable que cette solution soit efficace).

Je connais les effets du venin du genre Poecilotheria, je sais que généralement dans les premières heures qui suivent la morsure on ressent une violente sensation de brûlure et on observe un gonflement assez important au niveau et aux alentours du point d’entrée du venin. Hors je n’ai observé aucun gonflement ni aucune douleur particulière.

Je passe ensuite une soirée sans aucuns dommages notables (si ce n’est une légère angoisse).

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Poecilotheria rufilata, femelle adulte ©Jason Newland

Symptômes secondaires, envenimation par neurotoxine :

Le venin de toutes les mygales est principalement neurotoxique, sans exception connue, il s’attaque donc au système nerveux central, le but étant de paralyser la victime. Je suis évidemment bien trop gros pour être paralysé par une araignée quelle qu’elle soit néanmoins le venin essayera tout de même de jouer ce rôle.

Voici très exactement ce qui s’est passé dès le lendemain, une fois que le venin a atteint mon système nerveux :

– Courbatures généralisées, tout mon corps en a subit les conséquences comme-ci j’avais fait un effort physique trop intense, des pieds à la tête.
– Crampes musculaires légères de temps à autre
– Tétanies de certains muscles (le plus douloureux… la tétanie est une contraction extrême et involontaire d’un muscle pendant quelques secondes et c’est particulièrement spectaculaire car visible et intense en terme de douleur). Principalement dans les pieds et les mollets.
– État général de léthargie, en gros, comme-ci je m’étais pris une grosse cuite la veille sans pour autant avoir de maux de tête.
– Grande activité cérébrale pendant le sommeil se traduisant par des cauchemars suivis de réveils en panique (panique lié au cauchemar…).

Tout cela n’a duré que 4/5 jours en s’estompant peu à peu, pour avoir lu d’autres rapports de morsures je m’estime chanceux car cela dure normalement plus longtemps, la mygale a certainement injecté une dose minime de venin.

Pour traitement (non invasif), gros apport en vitamines et en magnésium (sans ordonnance dans toutes les pharmacies), ça m’a pas mal aidé. J’avais également une prescription d’Alprazolam (plus connu sous le nom de la marque Xanax, un anxiolytique) à ce moment-là, cet anxiolytique possède également une capacité de décontractant musculaire, l’ingestion (classique, celle prescrite par mon ordonnance) avait pour effet (secondaire donc) de soulager les douleurs imputables au venin.

Plus aucuns symptômes depuis, le venin a donc été totalement éliminé de mon organisme sans aucunes séquelles.

Le genre Poecilotheria est considéré comme l’un des plus venimeux de toute la famille des Theraphosidae, si j’ai une leçon à apprendre de cet évènement c’est qu’il ne faut jamais, au grand jamais être sûr de soi, que ces animaux restent totalement imprévisibles et dangereux. C’est de ma faute, j’ai pris un risque inutile et j’en ai payé le prix mais comme beaucoup d’autres avant moi.

NB: N’oubliez pas que les Mygales sont des animaux dangereux, et que leur maintien en France est soumis à législation (CDC+AOE)
N’hésitez pas à lire l’article sur la législation française pour plus d’informations.

Sources:
– Visitez la galerie Flickr de Jason Newland

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2 commentaires pour Rapport de morsure par une mygale du genre Poecilotheria

  1. Merci à Mr Rondet pour cette publication qui aura, j’espère, l’avantage de dissuader les nombreux écervelés qui pensent être capables de posséder des animaux à risques. Quant à la législation elle peut être rappelée avec justesse dans une autre publication mais ce n’était pas le but de l’article.
    Je profite de cet article pour rappeler à tous détenteurs de venimeux qu’il est préférable de mettre dans la confidence un médecin qui, lui, a la possibilité de faire déplacer des services sanitaires dans un délai très bref car on ne doutera pas de son diagnostic. Si, de vous même, vous arrivez à l’hôpital en expliquant : « j’ai été mordu par tel serpent, il va se passer ceci et cela donc il faut faire tel traitement », vous aurez en face de vous des gens qui vont le prendre de haut et vous dire :  » mais monsieur, vous n’allez pas nous apprendre notre métier » ( du haut de leur blouse blanche) . Ils vous traiteront avec toute la désinvolture qui les caractérise souvent et c’est seulement quand votre doigt deviendra noir et nécessitera une amputation qu’ils se réveilleront. C’est une situation vécue, pas par moi, mais par une relation de stage.
    Cet article est fait dans le but d’informer, pas de polémiquer, donc fin du débat.

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